SAINTELYON 2007 / récit de course

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SAINTELYON 2007 / récit de course par jc (invité) (82.250.76.xxx) le 04/12/07 à 00:34:29

Ceux qui ont lu mon compte-rendu sur le marathon du Grand Toulouse du 28/10 vont trouver quelques similitudes avec le compte-rendu qui suit. Tant mieux tant pis. On ne se refait pas !



SAINTELYON – 2 décembre 2007

Avertissement au lecteur, qui a le droit d'être une lectrice: je ne vous cache pas que certaines exagérations et digressions à tendance humoristique se sont glissées subrepticement dans le récit, malheureusement le correcteur d'orthographe ne peut les repérer. Bien fait pour vous! Mais si la forme est olé olé, le fond est bon. L'ultrafond aussi, d'ailleurs.

*******************

Commençons par une petite citation de Michel Delore, 21 participations à la Saintélyon, et plusieurs victoires à son actif surtout du temps où on y marchait, car il était interdit de courir (ne riez pas):

« L'effort de la Saintélyon me paraît représenter l'effort de deux marathons successifs, et pourtant elle reste une course de vitesse, ce qui fait une grande partie de son charme. Prenez le départ avec un moral d'enfer [...] » (riez)

2 marathons?

Oui pas loin, si l'on considère que les 1300m de dénivelé positif (et 1700 négatif) équivalent à un effort de course supplémentaire de 13km, cela donne donc 69 + 13 = 82 km. De plus il y a la nuit, le froid de décembre, la boue, la cohue, la fatigue de courir après minuit. Bref, tous les ingrédients sont là pour motiver les troupes! Plus c'est dur, plus on aime. Faut-il qu'on soit maso! Le principe de base de la course à pied...

Vu que j'ai couru et terminé mon 1er marathon fin octobre, je me dis tout guilleret que doubler la mise à la Sainté, c'est laaaaaaaaaargement possible (1, 2, 3 .... riez, vous n'êtes pas filmés).

De toute façon, je n'ai pas le choix, vu que le 2 décembre tombe un dimanche. Tout le monde sait que le dimanche est le jour de la sortie longue. Alors franchement, quelle excuse pour ne pas y aller, hein, je vous le demande?

Quoi? Comment? Vous dites?

C'est à 850 km de chez moi? Lundi je travaille? J'ai jamais couru si longtemps? Le temps est incertain? Ma femme avait préparé un gâteau et pas du gatorade? Je vais rater Michel Drucker?

Je vous réponds: ben.... vous avez raison. Sauf pour le gâteau. (ne riez pas, je ne vois pas où c'est drôle, parce que c'est bon, les gâteaux, surtout ceux de ma femme). Et pour le lundi, finalement accordé comme jour de congé.

Bon, reprenons.

« Course de vitesse » qu'il dit, l'autre, là... et il ajoute que « ça fait partie de son charme ». OK, noté.

« Moral d'enfer ». Ah la bonne heure! Voilà ce qu'il me fallait entendre!
C'est que le moral et moi, on est devenu copain, depuis Toulouse et ces 95 fameuses dernières minutes de souffrance, depuis les nuits de bivouac en montagne, dont en particulier celle de l'été 2003 accroché en bout de corde à 3300 m d'altitude dans la face sud de la Meije, après 22 heures d'escalade en aller-retour, tous deux avec mon frangin plantés là sous un surplomb à grelotter jusqu'au petit matin (il paraît que c'était un été de canicule – ne riez pas), sous les éclairs à la même altitude que nous (c'était une course d'escalade avec photomaton gratuit), et le lendemain on est redescendu comme des zombies, mais sains et saufs et fiers d'être sortis de cet enfer tout seuls. Même ma mère nous a reconnus, c'est pas beau ça? Je ne sais pas pourquoi elle pleurait alors... (là vous pouvez rire, il y a prescription sur cette aventure familiale qui mériterait bien au moins 20 pages)


Où en étais-je?

Ah oui, au moral. Hé ben il en faut quand-même un p'tit peu, à la Saintélyon.
Comme disait l'autre, au premier relais atteint après une heure de montée, « on n'est pas rendu ».

Mais le moral, on en a tous une bonne dose dans la famille, et comme on a fait un pot commun, chacun se retrouve avec un MORAL GROS COMME CA, ce qui nous avantage sur les concurrents. Lesquels sont plutôt nombreux cette année: 8000 annoncés dont 4400 individuels. Record. Et disons tout de suite que les organisateurs des prochaines éditions feraient bien d'acheter leur café chez Maxwell qualité filtre, car ce n'est pas la peine d'en rajouter ! Du début à la fin, doubler ou se laisser doubler est une constante préoccupation, le rayon d'action de la frontale est diminué, on se marche un peu dessus. Personnellement ça ne me convient pas trop, je préfère rester un peu à l'écart des autres, avoir de l'espace, courir dans ma bulle, conserver un peu d'intimité (notamment, désolé mesdames, messieurs aussi d'ailleurs, quand la différence de pression due à l'altitude qu'on prend ou qu'on perd exerce des influences gastro-intestinales qu'il faut, disons, évacuer...amis de la poésie bonsoir).

La famille, disais-je. Important, la famille.

Présentations:

Il y a le plus jeune, 35 ans (ne riez pas), mais aussi le plus expérimenté: Renaud. 3 UTMB, 2 Grands Raids, des 24h, 100km, etc. (là on rit moins, hein?).
Puis Hervé, 41 ans, le coéquipier du précédent, avec lequel il a commis tous ces délits cités plus haut. Presque le même niveau, et toujours moins bien classé car il est V1, et V1 c'est le vivier des champions dans les courses d'ultra.
Avec moi, ça fera 3 solos.
Et l'addition. Merci. Gardez la monnaie.
Yvan, 37 ans, courra en relais à 2 avec mon fils Thomas, bientôt 19 ans, pompier bon oeil, pompe l'air, mais pas pompiste. Et une grosse envie de battre ses tontons. Mais c'est pas demain la veille, comme on lui dit, privilège des « vieux »! Rien de tel pour l'agacer et le motiver. Hahaha, je me marre, car cette fois encore, les « vieux » feront les plus belles perfs. Enfin, pas tous. Mais j'anticipe...
Un copain podologue du sport nous accompagne, il court aussi en solo. 30 ans. Un gamin, quoi.

Retrouvailles familiales samedi chez les parents près d'Annonay, berceau de la mongolfière, lieu de notre enfance, toujours un brin d'émotion et beaucoup de convivialité. On ouvrirait bien une bouteille de St Joseph mais soyons sérieux, le programme ne le permet pas. A ma demande, le paternel met une bouteille de champagne au frais en prévision de l'après-course et on sort de la cave un excellent rouge dont je cacherai le nom, vu que je ne m'en souviens pas. Encore de quoi nous motiver.

Sieste générale obligatoire samedi après-midi. Au réveil vers 17h, on constate qu'il a plu. Comme prévu par la météo. On appréciera les chaussures de trail, parce que la boue, on va en déguster!

Derniers préparatifs. Le salon est jonché de bidons, porte-bidons, tubes de crème, gels, barres, photocopies de certifs (bien entendu, 2 l'ont oublié, il faudra, comment dire... « se débrouiller »... « allô chérie? Tu vas rire... tu sais envoyer une pièce jointe? »). Chacun s'enNoke ou s'enNike.
Pâtes à 19h30.
20h30. Grand départ pour StEtienne. La voiture nous emmène à 1161m d'altitude, col de la République. Puis descente vers StE, passage devant le chaudron alias stade Géoffroy Guichard, et on se rappelle l'année 1976, le 6-0 de StEtienne-Eindhoven ou le 5-1 contre Mönchengladbach en match retour, ah la grande époque des Janvion Revelli Rocheteau Repellini et autres Curkovic ! Allez les verts! C'est encore écrit à la craie à côté de la vitre de ma chambre chez mes parents!!! Y'a aussi écrit: allez l'ASVEL, on n'est pas chauvins... et mes parents sont natifs de Lyon!
21h15. Dans le grand hall du parc des expositions, on récupère les dossards, puces, T-shirt de bienvenue. On s'isole un peu à l'étage. Photos. Ravito. Dodo. Blagues de base. Comme d'hab, quoi. Faut se donner une contenance, ne pas stresser, et profiter en famille de ces moments exceptionnels.

Le speaker annonce les heures de départ. On (on=les 4 solos) finit par rejoindre la cohorte de coureurs à 23h45. On se faufile vers l'avant. 5 minutes avant le top départ, tous allument leur frontale pour les photos et la télé. Bonsoir les lucioles! Sympa.

00h00. C'est parti mon kiki. Hervé et Renaud prennent les avant-postes, ils y resteront longtemps, une heure ensemble, puis Renaud, disons-le tout de suite, va s'échapper pour terminer en 7h pile, à la 259ème place. Superbe. 9,9km/h de moyenne sur ce parcours, c'est une excellente performance. Hervé finira en 8h15, il obtient donc la « Saintélyon de bronze », Renaud celle d'argent.

Cédric (le copain podo) et moi partons nettement plus prudemment. Lui, il a comme objectif de « finir ». Sans idée de temps. Il mettra 8h50. Il sort des Templiers et n'a pas couru depuis. Chapeau.
On court 5 à 10 minutes ensemble, mais son rythme est un poil trop rapide pour moi, alors il me faut rapidement choisir entre courir avec lui ou courir au rythme prévu. Le choix est vite fait: ce sera l'option 2, pas question de fabriquer un mur!! J'ai parfaitement intégré tout le parcours, dont je connais la 2ème moitié courue en 2006, et je sais qu'il me faut courir les 5 premiers km plats à 9-10 km/h, surtout pas plus vite. Je n'y dérogerai pas. C'est ainsi que des centaines de coureurs vont me doubler pendant une demi-heure, mais rien ne me fera changer de mon « plan ». Je m'y tiens. Je vais donc courir seul. Allez OK. Bye bye Cédric, on se reverra au lever du jour, de l'autre côté du Rhône!

J'avais écrit et plastifié 4 mini-fiches recto verso à la taille de ma poche de veste, avec les indications des km et montée/descente/plat, km par km, ravito par ravito. Je les consulterai régulièrement pour anticiper l'effort et rectifier mes allures si besoin. Très pratique. A conserver.

Les rues larges et éclairées de St Etienne manquent un peu de charme. Frontale inutile, je l'éteins dès le départ. Le peloton s'étire, énormément de coureurs sont manifestement partis sur des allures trop rapides, je sais qu'ils vont le payer tôt ou tard. Ca rigole, ça discute, ça perd son énergie en zigzaguant, mais bon c'est ça les courses aussi. Quelques fiévreux du samedi soir klaxonnent ou font vrombir leurs moteurs dans les rues adjacentes.

Et puis plus rien, plus de bruit: on est dans la looooooooongue montée bitumée et ensuite en chemin, direction St Christo. Aucune surprise pour moi, je m'attendais même à plus dur. Certains coureurs sont un peu dégoûtés: « si c'est comme ça au début, qu'est-ce que ça va être dans 50 km!!! »
Je marche dès que le % de montée n'autorise pas une différence de plus de 2km/h entre course et marche rapide. Autant dire la plupart du temps! Je marche vite, et donc je double pas mal de (dis)coureurs.

Il fait frais, presque froid. 1 à 2°. Ce n'est pas pour me déplaire. Je transpire à peine. Le bonnet en polaire « Saintélyon 2006 » est le bienvenu, je le garderai jusqu'à la fin. J'apprécie également les gants en soie achetés 8 jours plus tôt.
Les champs sont blancs de givre, sur les crêtes un petit vent nous rappelle qu'il ne faut pas s'arrêter plus de quelques minutes au ravito. Ambiance hivernale. Plus bas, la vallée illuminée dans le silence nocturne; c'est magnifique de se retourner et de contempler toutes ces lumières: les lumières fixes de la ville qui s'éloigne, les lumières mouvantes des milliers de lucioles qui s'agitent en file indienne, nous autres. Magie de cette course! Rien que pour ce spectacle inédit, elle vaut le coup.
Arrivée au 1er ravito (16 km) à St Christo en 1h50, parfait! Je suis pile poil dans les temps que je m'étais fixés.

5 minutes après je repars. La montée continue un peu. Après 2h02 de course, le coureur n°2 du relais x4 me double à une vitesse concordesque! Un rapide calcul mental me permet de déduire que son relayeur, parti à 1h du matin de St Etienne, a mis moins d'une heure pour monter à St Christo!! Impressionnant.
C'est maintenant que commencent les dépassements des solos par les relayeurs. Bonjour la différence de rythme entre les indiv' qui ont déjà 2h de course dans les jambes et doivent se préserver pour la suite, et les meilleurs relayeurs encore tout frais! Plus tard passeront et dépasseront les autres relayeurs, ceux des relais x3, des relais x2. Tout ça est intéressant à vivre. Mais la cadence des dépassements nuit un peu à l'agrément de course, pour les dépasseurs comme pour les dépassés. « Relais! À gauche! » On se gare. « A droite, relais! ». On se décale encore.
Plus tard, la fatigue aidant, gauche et droite se confondent un peu dans la tête, car on percute moins. Donc ça percute davantage entre coureurs!! Pas bien grave, l'ambiance reste tout à fait cordiale et « compréhensive ». Encouragements mutuels.

La boue se mêle désormais à l'ambiance. Faudra faire avec. La pluie de la semaine et notamment celle de l'après-midi ont forgé un terrain glissant. Splash splash permanent, et pour certains boum badaboum! A un certain endroit, plus de 30 cm de profondeur dans une flaque gigantesque! Passage obligé entre les arbres.
Non non les chaussures ne resteront pas propres. Non non les pieds ne resteront pas secs. Oui oui le chrono va en prendre un coup! Disons tout de suite aux mauvaises langues que 8 ou 9 km/h de moyenne sur ce genre de terrain est loin d'être ridicule, et qu'à partir de 10 km/h on est à l'avant de la course! Rien à voir avec un marathon.

Sur les crêtes, quand le chemin ou la route sont suffisamment lisses et réguliers pour se permettre de regarder ailleurs, je lève la tête pour admirer la voûte étoilée. Il ne faut pas se priver de ce spectacle. Il est compris dans les 30€ de l'inscription! « Course pour amateurs éclairés » qu'ils disent. « Courez la nuit, ça n'a rien à voir ».
Spectacle sublime des vallées dormantes éclairées, à gauche comme à droite. Plus on avance, plus on croit que là-bas, tout au loin, c'est la ville de Lyon. Que nenni!! Il faut bien se mettre en tête que ce n'est pas Lyon, CE N'EST JAMAIS Lyon. D'ailleurs, il est où le crayon, hein?
(pour les non connaisseurs, le crayon c'est la tour du Crédit Lyonnais près de la Part-Dieu).
Lyon, on en reparlera plus tard, nettement plus tard. Pour l'instant, c'est Givors, au mieux! Et là, de l'autre côté, la vallée du Gier.

2h42 à ma montre. 2ème ravito: Moreau. Arrêt d'une minute, pas plus, car je m'étais bien chargé au 1er ravito, et j'ai assez de réserves. Je bois je mange. Du sucré du salé.

2h50: avis de tempête: prémisses de crampes aux mollets, je sens que ça va arriver. Oulala c'est pas top ça, va falloir vite, mais alors très vite rectifier le bazar. Pas question de me faire avoir comme à Toulouse! Je marche, je gère, OK c'était juste pour me rappeler que si la tête va bien, le reste du corps a ses exigences. Pas trop n'en faut, hein, jc !

La descente vers Sainte-Catherine est un parcours du combattant: très glissante, des pierres, de la boue, des racines, une bonne pente et un chemin étroit. Les relayeurs pressés donnent tout dans les derniers hectomètres avant de transmettre leur puce au suivant (relais x2 et x4). Ca double dans des conditions plus que limite! Je me rappelle l'an dernier, j'attendais là à Ste Catherine pour le relais, les secours s'activaient ferme! Des coureurs avaient chuté dans la descente. Aussi je me modère, je reste très concentré sur le tracé, hors de question de se tordre une cheville ou se retrouver dans les barbelés.

3h32. Je passe sur le tapis électronique et m'arrête au ravito, 8 minutes. Normalement mon fils est là, il doit me passer 2 gels pour ma seconde partie de course. Malheureusement je ne le vois pas, trop de monde. Tant pis, je continue. Hervé, Renaud et Cédric sont loin devant. Yvan ne m'a pas rattrapé, hahaha non mais oh qui c'est le chef, hein? lui qui est parti une heure plus tard de StE, ... mais il n'est pas loin, car il mettra 2h47 avant de passer le relais à mon fils Thomas. Quant à ce dernier, il s'élance donc quelques minutes après mon passage.

Montée raide après Ste Catherine, c'est le 31ème kilomètre. Presque tout le monde marche, surtout les solos.

« Bientôt la moitié ».

2 ou 3 km plus loin, quasi à la mi-course, je regarde ma montre: 4h10 = exactement la moitié de mon objectif de temps (8h20) et l'essentiel du dénivelé positif est derrière. Je suis donc plutôt confiant, très content. Mais forcément, toujours très prudent. D'ailleurs je commence à aller beaucoup moins vite. Surtout dans cette montée vraiment raide.

Au fait, Thomas ne m'a pas rattrapé? Bizarre, ça.

En réalité, il m'a doublé, sans me voir !!! Il n'a pas vu son père! Le père n'a pas reconnu le fils! Drame familial! Non je rigole.
Ca donne une idée de ce qui se passe sur cette course nocturne: on ne se rend pas compte de qui est qui et les sensations sont très différentes.

Ravito de St Genoux atteint en 5h exactement. Je suis à 36 km. Dans 40 secondes le premier arrivera à Lyon!

Je viens de faire à peine 6 km en 1h19... J'ai du mal à l'accepter ! Il y avait de la montée, oui, mais quand-même! Je révise mon objectif chrono, forcément! 9h serait bien. Partons là-dessus. Ou 9h30? On verra bien.

De descentes en faux-plats descendants, de montées en faux-plats montants, je module les allures, mais dans une fourchette nettement plus resserrée: je dois osciller entre 5 et 8 km/h. Les douleurs diverses et variées arrivent aux alentours du 40ème kilomètre. Et la ville de Lyon qui n'est toujours pas visible. Grrrrr! Mais je continue à mon train de sénateur. Je profite du moment présent, j'essaie de penser à tout autre chose que mes douleurs. Je regarde autour, je regarde les autres coureurs. Une course, c'est très mental. Ce qui se passe dans la tête est primordial. S'apitoyer sur soi est le début de l'abandon. Allez les verts! Allez l'ASVEL! Ouais!

A l'approche de Soucieu-en-Jarrest, une douleur inconnue se fait très présente, très continue, en haut de la cuisse gauche. Tiens donc, connais pas! Voyons voir (en pleine nuit!). Je passe du mode 'alternance course/marche' au mode 'marche systématique'. Quand-même, quelques mètres avant le ravito du km 46, également lieu de relais pour les x3 et x4, je me remets en course très modérée, car il y a beaucoup de monde par là, j'ai un peu honte de marcher... mais alors quel enfer, oui quel enfer!

J'invente un nouveau slogan: à Soucieu-en-Jarrest, je suis soucieux pour mes jarrets !

Je me ravitaille énormément à Soucieu. Je bois de tout, du thé, 2 verres au moins, 3 autres dans la gourde. Je mange un peu de tout. Je bois encore.

Je repars en trottinant. On est sur la route, ça descend. 47ème kilomètre donc. Au bout de 300 mètres, la douleur là, à gauche, me mord encore plus fort et m'oblige à marcher. Et à boiter. Ouille ouille ouille, ça craint. Stop obligatoire. J'essaie des mouvements et des positions que j'appellerai présomptueusement des étirements. Je me tiens la cuisse.

« Vous allez bien? Vous voulez qu'on appelle les secours? Ca va?
Non, ça ne va pas. »

Pas trop envie de me faire plaindre, mais pas envie non plus de laisser croire que ça va... de toute manière les apparences sont contre moi!

Je gamberge, je pèse les choses. Il reste 23 km et le fait est que je boite en marchant. Ca nous fait du 4 à 5 h au bas mot. +6h29 déjà derrière... allez c'est bon, laisse tomber garçon... t'as battu ton record de distance aujourd'hui, avec pas loin de 1000m+ en plus. Arrête les frais. Ce serait dommage de revenir chez toi en vrac, avec un temps ridicule, tout ça pour « finir ». Je n'aurai pas mon T-shirt finisher, je ne verrai pas les quais de Saône, la place Bellecour, la finish line. Remarque, je ne verrai pas non plus l'horrible montée de Ste Foy!

J'abandonne.
Lentement, je remonte les 300 mètres vers le ravito. Je boite de plus en plus, j'ai bien fait d'abandonner. Sage décision. Et si dans un quart d'heure ça allait mieux ?

Je rebois du thé. Non ça ne va pas mieux. Je me renseigne sur l'horaire des navettes de rapatriement sur Lyon. On annonce une navette à 7h. C'est dans quelques minutes. J'attends. Comme d'autres, qui plaisantent un peu pour conjurer leur déception d'avoir stoppé là. Ou ceux-là, silencieux. Je m'accroupis, pour changer de position. 7H10, toujours pas de navette. Le froid m'oblige à sortir la couverture de survie pour ne pas trembler. On a l'air vraiment bizarre, tous, là, avec nos habits brillants de cosmonautes, un dimanche matin dans les rues de Soucieu !!

La navette arrive, elle est aux trois quarts pleine de coureurs qui ont abandonné à Ste Catherine. Peu de coureurs montent. La prochaine est à ... 9 heures! Mais celle-ci reviendra. En attendant, je rentre dans le gymnase et me trouve un radiateur près duquel je m'accroupis et somnole. Le gymnase, on dirait un hôpital de campagne: des zombies errent lentement, çà et là, dorment par terre, assis, prostrés, ou allongés dans les couvertures de survie.

« Navette! »: ce cri me sort de ma torpeur matinale. Il fait jour maintenant. Les cosmonautes dorés d'un côté, argentés de l'autre, rejoignent lentement le car qui nous ramènera en 30 minutes à la Doua, lieu d'arrivée.

Un peu de tristesse, dans le car c'est silence radio, tout le monde est fatigué, déçu. Forcément. Chacun son histoire. Mon voisin avec qui j'engage la conversation s'est fait une entorse quelques kilomètres après avoir pris son relais. Alors qu'il l'avait déjà faite en solo l'an dernier, cette STL. Rageant! On se console un peu, on partage notre ressenti.

A l'approche de la Doua, on longe le parcours des derniers hectomètres. J'essaie de repérer mon fiston, un frangin. Personne. Ils sont presque tous arrivés.

A la descente du car, les douleurs reprennent de plus belle. Je marche 300 mètres et puis impossible de faire un seul pas. Je suis bloqué! Je pousse ma jambe gauche avec la main, seule façon d'avancer...
Je zone un peu vers la ligne d'arrivée, je ne vois aucun frangin. Ils sont dedans, ou sous la douche.
Il faut me reposer. Je rends ma puce et récupère mes 15€ de caution.

Je retrouve mon fils dans un hall, finalement les autres aussi.

On se raconte brièvement « ce qui s'est passé » pour chacun, on se félicite. Ticket repas. Pâtes au menu. Ben oui, faut reconstituer les réserves! Le champagne ça sera dans une heure, chez les parents.

Pas le courage de bouger pour aller à la douche. Je me traîne vers la voiture. Réflexion de Thomas: « C'est bien d'avoir des bras, c'est pratique pour faire rentrer les jambes dans la voiture! »

Finalement on l'a bu ce champagne! Et aussi 2 bouteilles de la cave paternelle, avec un excellent gratin dauphinois!

Sur la route du retour, 800 km, on se repasse le film de la nuit. Impossible de tout dire ici. Mais comme je voulais faire ce compte-rendu aujourd'hui lundi, j'arrête ici ma prose.

L'année prochaine, on reviendra. Pour quoi faire? Je ne sais pas. Il y a quelque chose qui nous a tous accrochés sur ces collines des monts du Lyonnais; comme un aimant, ou un amant peut-être?

jc

SAINTELYON 2007 / récit de course par pic75 (invité) (67.159.128.xxx) le 04/12/07 à 01:41:23

Bravo pour le compte-rendu....dommage arghh les blessures ? et ca va mieux sais tu ce que c'est?

elle me manque cette course !! térrible !!
Vivement l'année prochaine

SAINTELYON 2007 / récit de course par shadock (membre) (137.129.13.xxx) le 04/12/07 à 07:53:13

Merci pour ce CR !
:-)

SAINTELYON 2007 / récit de course par jc (invité) (80.15.159.xxx) le 04/12/07 à 13:16:53

@ Pic75.
Non je ne sais pas ce qui m'est arrivé exactement. Début de tendinite? La douleur a totalement disparu après 24h, alors qu'aujourd'hui je sens encore un peu cuisses, mollets, tendons divers...
Douleur complètement invalidante lors de la course et pendant 3 ou 4 heures après, mais disparue assez rapidement. Tant mieux, mais ça m'intrigue cette histoire!

SAINTELYON 2007 / récit de course par Kriko (membre) (145.64.134.xxx) le 04/12/07 à 13:50:18

Bien joué quand même JC, tu reviendras plus fort. On a du se croiser souvent, on a été longtemps dans les mêmes temps.

SAINTELYON 2007 / récit de course par flo (invité) (90.2.141.xxx) le 04/12/07 à 14:05:21

Très beau cr!!
Merci pour ce recit prenant!!! J'avais l'impression d'y être. Bravo à toi pour cette course et l'année prochaine tu reviendras plus fort encore!!
Comment va la blessure aujourd'hui?
Pour finir je dirais une chose: Allez les Verts :) Janot c'est pas curko, Gomis ce n'est pas Revelli et feinduno ce n'est pas Larqué, mais je les aime quand même!!

SAINTELYON 2007 / récit de course par pmb13 (membre) (81.255.199.xxx) le 04/12/07 à 14:54:30

Merci JC pour ton CR qui est vraiment bien fait.
Juste une petite question concernant ta performance et ta préparation.
Quelle était ta meilleure performance sur un marathon avant de te lancer dans cette entreprise et quel plan as-tu suivi ?
Moi aussi je voudrais bien tenter la Sainté-Lyon en solo un jour mais je me demande si avec mes 4H13 au marathon je ne cours pas au devant d'une grande désillusion physique ?
Vos avis à tous m'intéressent.

SAINTELYON 2007 / récit de course par stefun (membre) (84.14.254.xxx) le 04/12/07 à 14:59:39

Bravo pour ton courage et ce fantastique compte-rendu. C'est souvent facile d'écrire un compte-rendu après une course réussie mais même là tu l'as fait alors c'est bien. Ca nous permet de toucher du doigt la difficulté d'une telle épreuve. Il sera bientôt temps de penser aux prochains objectifs.

SAINTELYON 2007 / récit de course par gavroche (membre) (62.23.209.xxx) le 04/12/07 à 16:00:20

merci pour ce cr, la fin est poignante mais tu reviendras l'année prochaine j'en suis sur, il vaut toujours mieux se préserver qu'être bléssé pendant des mois. tu as pris la bonne décision, en tout cas ton récit donne réellement envie de faire cette course et ça c'est formidable!!!

SAINTELYON 2007 / récit de course par jc (invité) (80.11.117.xxx) le 04/12/07 à 16:51:38

@ pmb13

En fait, je préparais la Saintélyon depuis septembre, avec des sorties de type prépa marathon. Et puis j'ai fait le marathon de Toulouse le 28/10, comme ça, sur un coup de tête (de coeur?), me disant qu'à 5 semaines de la Sainté ça serait OK. Mais j'ai bien morflé au marathon, il m'a fallu récupérer et entre Toulouse et la STL, je n'ai pu faire que 2 sorties longues (2h15 avec 500m+ à chaque fois) ce qui n'est pas suffisant. Ca m'a bouleversé mon plan d'origine, conçu en gros comme ça: 3 à 4 sorties dont 2 en endurance de base d'une heure avec un peu de côtes de temps en temps (dont une de nuit), une sortie longue 1h30 à 2h15 et une sortie avec du fractionné.

J'avais couru le marathon en 4h20 (1er semi en 1h53), fini douloureusement.

A mon avis il faut faire des sorties de 2h30 avec dedans des accélérations (passages de 15 à 30 minutes à 80-85% fcm), voire enchaîner 2 ou 3 sorties longues sur 3 ou 4 jours. Et puis des sorties avec alternance marche/course, pour apprendre à gérer son effort, se ménager le plus longtemps possible.

Ce qui se passe le jour de la course est de toute façon assez imprévisible. Mes frères en sont l'exemple vivant: avec un niveau sensiblement égal, l'un passe en 7h, l'autre en 8h15. Il y a des jours avec, d'autres sans.

Arriver frais et reposé, bien hydraté avec le plein de glucides est aussi essentiel. La base, quoi!

Je ne comprends pas ce qui m'est arrivé. Un nerf coincé? un problème musculaire que je ne connaissais pas? Mystère.

SAINTELYON 2007 / récit de course par piermer (membre) (62.147.72.xxx) le 04/12/07 à 18:29:38

@ jc qu'il est beau ce CR !!
on en n'oublie tout et cela donne l'envie de recommencer et je suis sur que tu recommenceras .
Je l'ai fait en duo l'an passé et tu restitues parfaitement l'ambiance et du parcours et de tous ceux qui participent
Bravo ..de toute façon quand on aime courir on ne compte pas qu'elle qu'en soit l'issue , le tout est que seuls les bons souvenirs soient là pour pousser à revenir.

SAINTELYON 2007 / récit de course par Boblastar (invité) (213.44.195.xxx) le 04/12/07 à 21:16:14

Magnifique ce CR !
Mêmes sensations en 2005, abandon avant Soucieu, malade, et déprime pendant 3 jours (je sais c'est con ce n'est que du sport mais bon).
Et puis finisher en 2006 :)
Et puis des jumeaux en 2007...et encore une STL cette année (mais petit joueur seulement les 39 derniers km).
Bonne récup' et l'an prochain tu inscriras ton nom sur le tee-shirt !

SAINTELYON 2007 / récit de course par jc (invité) (82.253.253.xxx) le 04/12/07 à 22:11:24

boblastar et Piermer, merci, vous êtes sympas les gars!
J'avais hésité à poster ce CR, n'étant pas finisher, mais bon c'est toujours intéressant pur les futurs adeptes de la STL d'avoir aussi le ressenti de ceux qui ont connu des défaillances.
Pour moi pas de déprime, je me relance sur d'autres objectifs, je relativise les déceptions, je garde le positif, je pose deux, je retiens un, et ça me fait un challenge pour l'édition 2008 !

SAINTELYON 2007 / récit de course par pic75 (invité) (67.159.128.xxx) le 04/12/07 à 22:14:33

Je suis curieux maintenant d'avoir ton récit...sur la Meije...mais ailleurs surement...
Arghhh, la Meije que dire sur la Meije....

RIEN, je ne trouve rien à dire, elle me laisse sans voix !!
;-))))

j'arrête et vous laisse tranquille
Bonne nuit messieurdames, il est temps pour moi de repartir bosser...

SAINTELYON 2007 / récit de course par jc (invité) (82.253.253.xxx) le 04/12/07 à 23:32:22

Oulala, pic75, si tu me branches sur la Meije... on n'a pas fini !!
La Meije c'est une autre partie de moi-même, c'est mon sommet fétiche; j'en ai gravi les 3 sommets principaux (l'Orientale, le Doigt de Dieu, le pic occidental), fait le tour au printemps par le col du Pavé et la Brêche, skié tous les alentours, avec une mémorable descente des vallons dans une neige pourrie, randonné des dizaines de fois à proximité, bivouaqué loin, près, dessous, dessus, dedans presque... j'en ai la couleur dans la rétine et l'odeur du rocher collée aux naseaux dès que j'en parle. J'entends le bruit du torrent des Etançons quand je ferme les yeux, le cri des chocards mangeurs de trognons de pomme lancés dans le vide depuis le sommet dans les tympans, je ma rappelle le cliquetis des mousquetons clipés dans la dalle Castelnau, etc.
J'ai gravi une bonne partie des sommets alentour: le Rateau, le Pelvoux, la Grande Ruine, les Agneaux, les Ecrins...

SAINTELYON 2007 / récit de course par glinka (invité) (81.220.238.xxx) le 05/12/07 à 00:09:10

Un seul mot: MERCI!
Enfin, c'était une blague, un mot ne suffit pas, alors merci de coeur pour ce comte-rendu passionnant, je m'imaginai courir à coté dans la nuit du 1er décembre.
Merci également pour la poésie sur le Meje (c'est où d'ailleurs?)!

Vivement tu t'es bien remis de ta blessure. Je te souhaite plein de bonheur sur les prochaines courses que tu entreprendras.

MP

SAINTELYON 2007 / récit de course par pic75 (invité) (67.159.128.xxx) le 05/12/07 à 01:02:30

Au secours....arrêtons la...
tu me fais beaucoup de mal en parlant de la Meije...

Je n'ai rien fait sur ce sommet ni autour ni dessus (seulement sur les cartes géographiques et géologiques)...mais rien que de la contempler me suffit (quoique des fois...) .J'ai juste fait plusieurs fois les vallons...(enfin, je ne suis jamais sorti de la route normale des vallons (pas fait le pan de rideau ou autre...)

Mais cette montagne...qu'est ce que je la trouve belle.

tu peux emmener un novice faire des randos d'alpinisme (touristes) dans le coin ? ....non, non je ne suis pas interessé !!!

SAINTELYON 2007 / récit de course par jc (invité) (82.253.253.xxx) le 05/12/07 à 09:38:21

pour Glinka:
La Meije se trouve en Oisans, (c'est son plus beau sommet) sur la route du col du Lautaret, entre Bourg d'Oisans et Briançon. Elle culmine à 3983m, c'est "le Cervin du Dauphiné".

pour Pic75:
j'habite désormais très loin des ALpes, je n'y viens qu'une semaine l'hiver et deux l'été. L'été, je fais de l'alpinisme, en Oisans ou ailleurs (Chamonix).

SAINTELYON 2007 / récit de course par zermatt (invité) (81.62.98.xxx) le 05/12/07 à 09:55:02

bonjour...la meije beau sommet!! sourtout en traversée...moi je lui ai toujours préfére la barre des ecrins,soit en passant par bonne-pierre ou alors louis-blanc plus classic...ca fait plaisir de voir des gens comme toi sur ce forum...

SAINTELYON 2007 / récit de course par jc (invité) (82.253.253.xxx) le 05/12/07 à 10:20:08

Salut Zermatt.
Quel beau pseudo. Tu me donnes envie de changer le mien en "La Grave" ou "La Bérarde"... mais ça ferait un peu féminin :-))
Ah! la montagne!
Et aussi les footings en montagne, c'est génial.
Là où j'habite maintenant, au pays basque, je cours dans les collines, c'est super aussi.

SAINTELYON 2007 / récit de course par piermer (membre) (62.147.72.xxx) le 05/12/07 à 11:55:06

en lisant jc -que je n'ai pas commenté concernant la Meije-
....les STL(iens )et apparentés ... vont tous finir par se rencontrer dans l'Oisans cet été.
beh oui .. jc j'habite à une heure de l'Oisans et c'est aussi mon royaume que je partage avec la Vanoise en ski et alpinisme .Alors la Meije,le Rateau .. Planchard de l'autre coté ( ou j'étais responsable du refuge /STD !!) c'est i nou bli able mon cher jc !.. j'ai appris avec plaisir que tu affectionnes ce coin et on le comprend .
alors tous à la STL en 2008!!

SAINTELYON 2007 / récit de course par zermatt (invité) (81.62.98.xxx) le 05/12/07 à 12:06:40

a piermer...
bonjour as tu connut un certain LUCIEN-GUIMET du caf de lyon?? il etait responsable des ref de l oisans et de vanoise...

SAINTELYON 2007 / récit de course par jc (invité) (82.253.253.xxx) le 05/12/07 à 12:48:22

@ piermer.
On se connaît peut-être de vue alors, car je suis monté 2 fois à Adèle. La dernière fois le 12 juillet 2005 pour gravir la Grande Ruine avec ma fille. Ce soir-là, il neigeait, coucher de soleil fabuleux avec spectre de Broken.
Mon frère a essayé d'établir un record de montée, je ne me souviens plus de son temps (dans les 2h je crois depuis le pied du col).

J'habite au pays basque, mais mes parents sont en Ardèche, et j'ai la chance de pouvoir fréquenter leur chalet au Mont-de-Lans de temps en temps.

SAINTELYON 2007 / récit de course par pic75 (invité) (67.159.128.xxx) le 06/12/07 à 00:41:30

ARRETEZ.....

pff pour quelques temps encore j'habite à Sacramento...odnc ca va êtr dur de se faire les vallons...
arghh, la Bérarde, St christophne, le pré de Mme Carle,...enfin les écrins quoi :-(

Bonne nuit...et comme l'a dit Piermer..;peut êtr à bientot sur la STL ou sur les chemins de l'Oisan

La montagne ca vous gagne !!!

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