CR Tchimbé Raid 2007

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CR Tchimbé Raid 2007 par olivier972 (invité) (90.31.91.xxx) le 18/05/07 à 01:25:40

Hello,
J'avais posté, il y a quelques jours sur le même sujet, voilà le compte rendu.
Voici le lien du club pour les infos : http://www.tchimberaid.org/
A+

Les+:
L'organisation sans faille, les paysages de la Martinique, l'ambiance, la technicité du parcours.
Les-:
Peut être loin de la métropole pour vous...

(c'est ma 1ere année de trail, 6ème trail de l'année, 1ere ultra)
(52km à vol d'oiseau --> 65km à pied)

Ca y est. J'y suis. C'est le jour J.
Un peu moins d'un an que j'en pense à cette course, aujourd'hui va pas falloir flancher. Un an de préparation physique et mentale (et oui !!) a mettre au profit de cette belle journée.

1ere Etape Didier/Absalon 5,167km et D+429m - 30 minutes.
(reste 50,471km et D+4152m)

Il est 5h du matin, les 250 coureurs presque tous équipés de frontales, se sont entassés dans le tunnel. Je suis en compagnie de Nathalie et Amandine qui se sont proposées d'être mes porteuses d'eau toute la journée.
Le départ vient d'être donner, un grand cri de joie (ou de peur ?!) sort du peloton.
Je ne cherche pas être déjà au devant, mais je sais que cela risque de bouchonner dans le pitons, donc j'ai choisi de partir d'un bon rythme.
L'ambiance nocturne est magique avec les reflets de toutes ses petites lumières sur les sacs à dos et les chaussures, ainsi qu'avec cette nature tropicale qui s'éveille à peine.
Ce petit "échauffement" se fait sur la route de Didier, non loin de la station d'embouteillage et des jolies cascades.
Très vite, je me situe dans un petit groupe d'une dizaine de coureurs avec qui je vais rester une bonne partie de la matinée, le trou c'est déjà fait avec ceux de devant (les boss), notre vitesse doit être 12km/h.
Nous empruntons une route bitumée sur 3 km puis un chemin de terre (je devrais dire de boue) montant sur 2 bornes, avec entre les deux, un gué, que je passe comme d'hab les pieds mouillés.

2ere Etape Absalon/Modeste 9,981km et D+1431m - 2h55 - 3h25 au total
(reste 40,49km et D+2721m)

Arrivé à la station thermale d'Absalon, c'est le 1er ravitaillement, on m'annonce ma position. Comme il y a beaucoup d'agitation, je n'entends rien, je commence à être dans ma bulle... Deux verres d'eau en 5s (digne du trophée Ricard...) et c'est reparti. Histoire de discuter un peu avec mes camarades de galère, je demande combien nous sommes. Un gars me repond dans les cinquantièmes. Pas mal, surtout que je sens bien, c'est impeccable pour le moment.
Il fait maintenant jour, mais le ciel est complément bouché. La montée des pitons se fera donc dans la brume.
Après une petite bosse, nous arrivons à l'endroit dit l'arbre remarquable, il s'agit d'un énorme gommier blanc (dans un temps passé, on y sculpterait en un morceau une coque de bateau), c'est le pied du piton Dumauzé, la course commence vraiment ici, c'est parti pour D+600 sur 1500m dans joie, la bonne humeur et la boue, surtout la boue... Azimut zéro, tout droit, ici pas de zig ni de zag.
Dans cette ascension, j'essaie d'aller assez vite pour ne pas bouchonner les gars derrière moi, mais je ne peux pas aller plus vite de toute façon.
Pour avancer de 30 cm, il faut souvent gravir 1m, une vraie machine à crampe ce Dumauzé. Sur les 200 derniers mètres, j'avance pratiquement à quatre pattes, m'accrochant à m'importe quoi (désolé la nature) pour ne pas reculer à chaque pas.
Arrivé au sommet, je m'accorde une pause pour prendre un gel dans mon sac à dos, les barres ne veulent plus passer, c'est trop plein dans mon estomac.
C'est parti pour la descente, je redoutais ce moment. C'est comme le CamelTrophy, mais avec une pente de 30 %.
Je tombe plusieurs fois, glissade et cascade, et j'adopte comme tout les raideurs le style : " un peid devant, et l'autre sous les fesses, les mains servant juste à la stabilisation". Glissades plus ou moins contrôlées, c'est l'amusement. Une petite pensée pour ceux de derrière, lorsque le chemin sera devenu impraticable. Je suis recouvert de boue, à cause de toutes mes chutes.
Même pas le temps de faire ouf, que c'est reparti pour l'ascension du piton Lacroix. Je suis toujours avec les mêmes têtes qui sont de plus en plus bavardes. Sympa, le temps passera plus vite. Au sommet à côté de la station météo, l'organisation a prévu un point eau, merci. L'on me fait le plein gentiment, pendant que je reprends un gel. Et plus personne autour, je repars tout seul.
C'est de nouveau la descente, du même style que celle du Dumauzé, mais avec une fin plus facile en sous-bois.
A un endroit, en levant la tête par hasard, j'aperçois entre les arbres, la ville du Carbet et la mer des caraïbes éclairées par un rayon de lumière, entendant dans la vallée les tambours des mornes qui annoncent par un roulement de "zouk" l'arrivée des raideurs au deuxième ravitaillement. MAGIQUE, j'en avais presque des frissons partout.
Le temps de retombé deux ou trois fois, j'arrive au Morne Modeste. Deuxième coup d'oeil sur la montre, 3h25 !!! J'ai 35 minutes sur mon horaire le plus optimiste, trop contant.
Les tambours des mornes me font une haie d'honneur, j'ai même droit à un coup de lambi !! Les applaudissements, c'est pour moi ??!! Je me retourne personne, ben ouai, c'est trop gentil.
Un papi sur le bord de la route me tend un morceau de canne à sucre, en me lançant un "tchimbè rèd", je réponds fièrement par un "pa moli".
Je mâchouille ma canne, tout en cherchant Nathalie et Amandine. Après avoir était surprise de déjà me voir, nous nous dirigeons ensuite vers la voiture.
Je me fais tirer les oreilles car je n'ai pas bu toute mon eau dans le camelback. "Vous ne vous embêtez trop pas les filles ?" "Non, nous avons tout le monde, le 1er est passé il y a 1h30 déjà" "Ok !!"

3ème Etape Modeste/Fond-Saint-Denis 5,139km et D+335m - 1h10 - 4h35 au total
(reste 35,351km et D+2386m)

Au moment de repartir, Nath me dit continuer avec Marie-Chantal qui ce présente à notre hauteur. Ce que Nath ne sait pas, c'est que Marie-Chantal à déjà gagner deux fois le Tchimbé Raid, et que donc je vais avoir beaucoup de mal à la suivre.
C'est une étape de liaison rien de difficile, mais le soleil commence à taper. Le temps classique de la Martinique, chaud et humide.
Comme je me l'avais dit, maintenant, je ne cours plus dans les montées et j'assure tranquille dans les descentes (cela serait bête de se tordre à nouveau la cheville). Après quelques minutes et un long faux plat, nous retrouvons la forêt.
C'est si beau, tout les dégradés de vert offert par cette végétation tropicale si luxuriante, ainsi que d'entendre tous les bruits de la nature. C'est aussi cela, l'esprit du raid.
Lors une descente je n'aperçois plus Marie-Chantal, que j'accompagnais depuis quelques kilomètres.
En fait, je me fais dépasser plus que je ne dépasse, je dois être 60ème, mais le moral est bon, et j'ai mal nul part, bref tout va pour le mieux.
Sur la fin de cette partie, il y a 50 mètres d'escaliers, et je double des coureurs à la peine.
En arrivant à Fond-Saint-Denis, les filles ont été rejoint par Samuel.
Comme j'ai de l'avance, je décide un arrêt stratégique. Changement des chaussettes.
Les pieds semblent nickels, et comme pour toute la journée Nath et Amandine s'occupent de mon sac, boisson et gel.
Nous discutons, des bêtises pour rigoler, c'est bon pour le moral. Et je repars.

4ème Etape Fond-Saint-Denis/Sainte-Cécile 5,498km et D+291m - 1h10 - 5h45 au total
(reste 29,853km et D+2095m)

Je me dépêche pour rattraper un groupe et j'entame une discussion avec les uns et les autres sur la course et la Martinique.
Quelques escaliers pour nous faire passer au dessus de la ville de Fond Saint-Denis, afin d'atteindre le petit sentier qui nous permettra de basculer dans l'autre vallée. La montée jusqu'au col, n'a aucune difficulté, et fidèle a ma tactique, je marche mais à une très allure soutenue, presque aussi vite que d'autres qui courent. Tranquille, je profite de la beauté de la Martinique, l'île au fleur porte bien son nom aujourd'hui, balisiers, ixoras, hibiscus ou anthurium à chaque coup d'oeil.
C'est le moment de faire un petit "cheking" général. Petit calcul de mon alimentation en eau, le mélange sucrée préparé par les filles semble bien passer, le solide par contre ne passe plus depuis bien des kilomètres, mais niveau calorique cela devrait être bon (surtout qu'il me reste quelques réserves de gras) je ne prends plus que des gels et des fruits, le moral est toujours au beau fixe et même pas la moindre petite sensation d'un petit bobot. Tout beigne.
Encore tout seul, j'aborde une longue partie sur la route en ligne droite. J'entends une voiture, je me retourne, ouha !! Une vue superbe sur les pitons maintenant dégagés (tu viens de là mec !!). En me retournant, face à moi la ligne de crête que je vais emprunter après l'arrêt à Sainte-Cécile. Et sur ma gauche, entre les arbres, la montagne Pelée qui sera le dessert de ma journée. Extordinaire.
Devant un tel paysage et la difficulté de l'instant, je ne me peux m'empêcher de penser à mes deux années passées en Martinique, toutes ces choses que j'ai découvertes ici, ainsi que tous ceux que j'aime qui sont de l'autre côté de l'océan.... Il y aura aussi sûrement plein d'autres jolies choses à faire ailleurs...
Soyons fou !! Je chope mon portable dans mon sac, et j'appelle ma douce à 8500 km. "Qu'est ce que tu fais ? t'avais pas une course" " si, mais je t'aime ! "t'es sur que cela va ? tu t'hydrates bien?" "oui". Une petite larme et c'est reparti. Façon de dire , car je ne me suis pas encore arrêté, en fait je me replonge dans mon moi intérieur.
Mais pas le temps de faire ouf, que j'aperçois au loin une banderole "Olivier Tchiembé rèd"... Mais c'est mon prénom ?!! C'est pas vrai, c'est pour moi, quelle surprise. Mes amis de la plongée Regis et Muriel. A nouveau les larmes, puff que d'émotions cette course... "Comme tu es en avance les autres (Emma, Marie-Agnès, Marion) ne sont pas encore là". Séance photo, avec un vétéran martiniquais sur le dernier bout de route avant le 4ème ravitaillement. J'arrive à Sainte-Cécile, j'ai toujours 20 minutes d'avance. Je vais prendre une pose massage pour profiter de tout le monde, maintenant que Nathalie, Amandine et Samuel nous ont rejoins.
J'ai l'impression d'épater tous mes amis, c'est si bon les encouragements. Ils pensaient peut-être que j'allais pas passer les Pitons ? :-).
"Oui, oui, c'est bon je vais finir, il me reste 7 heures pour faire 15 bornes afin de passer la dernière barrière horaire". La masseuse, me donne quelques cachets d'arnica pour prévenir les crampes.
Je n'arrive toujours pas à manger, je me fais plaisir avec des melons et des ananas.

5ème Etape Sainte-Cécile/Morne Rouge 14,79km et D+1040m - 3h30 - 10h au total
(reste 15,063km et D+1055m)

Je repars à la 70ème position, cet arrêt fut un peu long, mais c'est normal de passer un peu de temps, à ce qui se sont déplacés pour venir me voir.
Je sais que c'est l'étape qui sera la plus dure, pas de grosses difficultés, mais la succession cette ligne de crête en yoyo et le long faux plat à la fin va faire mal, mentalement et physiquement. Je l'ai fait en 2h20 sous la pluie, il y a 1 mois, là je mise sur 3 heures.
C'est finalement la chaleur qui me sera fatale, à moins que cela l'envie de gérer pépére la fin de course.
Je ne vais pas plus vite que mes camarades du moment dont plusieurs semblent chevronnés. J'ai décidé de ne plus regarder ma montre, cela tombe bien car mes chevilles commencent à fatiguer, pas de pression. Je ne m'aperçois pas que je suis un rythme plus lent, donc que le temps de ce parcours va être plus long (je devrais savoir cela :-)), et donc que je risque de manquer d'eau. Je ferais les 4 derniers km sans eau... cela risque de me faire mal par la suite.
La décision de m'arrêter une demi heure au prochain ravitaillement, pour reprendre des forces, s'impose logiquement à moi. Il reste encore 15km dont la montagne Pelée, cela serait bête de craquer maintenant. En arrivant au ravitaillement, une dame me dit "Olivier ton fan club est par là". Emma, Marie-Angès, Marion et Muriel portent toutes le même tee-shirt à mon effigie, j'en suis gêné. C'est top, mais j'ai plus force pour sauter de joie, j'ai même peur de sourire, cela pourrait provoquer la crampe si redoutée. Pointage, massage, rhabillage.

6ème Etape Morne Rouge/2ème Refuge 6,118km et D+898m - 2 - 12h au total
(reste 8,945km et D+157m)

Je laisse mes amis, et je fais bise à Muriel et à Régis, les autres vont me retrouver au 1er refuge dont l'accès se fait par la route.
Petite descente jusqu'à une ravine, puis montée par un chemin agricole le long d'un champ d'ananas, toujours au soleil. Au bout de quelques minutes le massage ne fait plus effet, et je me sens à nouveau fatigué de partout, j'ai du mal à mettre un pas devant l'autre. Je décide de me me fabriquer un bâton de marche avec une branche, pour me soulager.
J'avance comme l'on dit au moral. J'arrive à la hauteur d'un groupe de personnes fatigués mais au regard très motivé. Le temps de me garer sur une partie à l'ombre pour prendre un gel dans mon sac, qu'un autre concurrent arrive à ma hauteur et tombe à mes pieds. "Ca va ?" "J'ai le souffle coupé !!" "(à cette altitude et ce rythme ??!!)". Je lui propose un gel ainsi que de repartir avec moi. Il me demande de prévenir l'organisation. Que faire ? Coup d'oeil en aval, 2 raideurs devraient être sur lui dans 5 minutes. Un petit coup de turbo ne me fera pas trop de mal pendant quelques minutes. "Tchao, tiens bon, j'appelle les secours".
En cinq minutes, j'arrive au pointage, et j'apprendrais plus tard son évacuation. Je retrouve aussi mes amis, qui me suggèrent de prendre un peu de chocolat, de chips et de magnésium pour tenter de régler mes problèmes d'alimentation. Re-pose, ce n'était pas prévu. Il y a bien un problème énergétique, pourtant j'ai toujours sur gras de réserve sur le bide !! De toute façon maintenant, le classement je m'en tape , je veux juste arriver avant la nuit.
C'est pas que je m'ennuie avec vous les amies, mais je vous laisse, il y a une arrivée qui m'attend. La fin de l'ascension de la Pelée ne m'a jamais paru aussi difficile. Sur le plateau des palmistes, je suis ébloui par le soleil qui a entamé son couché. Mon objectif d'arriver avant la tomber de la nuit, va-t-il se réaliser ?

7ème Etape 2ème Refuge/Grand-Rivière 6,118km et D+898m - 1h53 - 13h53 au total

Dernier pointage, ma position est de 99ème. J'en ai perdu des places en 4 heures... Ok il y en a plus derrière que devant, mais le 1er doit être déjà dans l'avion.
La Pelée m'a achevé, mes jambes peuvent cramper à tout moment. Et l'on continue à me doubler. "z'on pas l'air très frais, dans quel état je dois être?"
Le début de la descente sur Grand-Rivière est très technique, j'en casse mon bâton, et là c'est drame. Crampe. Je me roule dans tous les sens pour étirer ma jambe droite. Dans une demi heure au plus tard il fait nuit, il me reste 5km cela devrait être bon si je cours.
En reprenant un peu de vitesse, j'en oublie mes douleurs au chevilles, à presque regretter d'avoir marcher si longtemps.
Dans un sous-bois, la faible luminosité m'oblige à sortir la lampe frontale. Cela ne rendra que plus magique mon arrivée. J'aperçois les lumières du village du bout du monde, je l'ai fait, 65km , les pitons, la Pelée, la boue, le soleil...!!
C'est l'arrivée, sous les applaudissements, c'est la fin. Je n'ai pas vu ces 13h50 passées, je suis heureux.
Douche, massage et discutions avec les uns et les autres, coureurs et supporteurs, même nous sommes tous fatigués, il reste toujours un peu d'énergie pour rigoler de cette journée de folie.
Direction la maison, plein de joie et l'envie de le refaire l'année prochain.

CR Tchimbé Raid 2007 par olivier972 (invité) (90.31.91.xxx) le 18/05/07 à 01:27:49

Désolé par réussi à poster dans la partie trail.
Si le messga peut être déplacé.
Cordialement.

CR Tchimbé Raid 2007 par Snoopo (membre) (82.229.142.xxx) le 18/05/07 à 02:15:42

Bravo, vraiment bravo!
Merci pour ton CR, c'est un très bon partage de tes émotions.
Un jour peut-être pourrais-je faire une telle course... :-)
@+

CR Tchimbé Raid 2007 par Calou (invité) (86.203.155.xxx) le 18/05/07 à 09:06:36

Je l'attendais ce CR, je le guettais...

Merci Olivier de nous faire partager cette émotion et bravo pour ta course.
Tu restitues très bien l'ambiance (jusqu'au coup de lambi qu'il m'a semblé percevoir....)
On ne doit plus tout à fait être le même après avoir vécu ça....
Je retiens tout de même une chose : Le "gras du bide" ne suffit pas comme réserve énérgétique !!!!
UN GRAND BRAVO à toi et je te souhaite un bon repos, bien mérité.
Calou

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